Journée de l’écrivain en prison 2021 — Agir pour les écrivains érythréens en prison

NomsProfessions
Dawit Isaak Auteur, journaliste et dramaturge 
Amanuel AsratJournaliste, poète, critique d’art et compositeur 
Said Idris « Abu Are »Auteur, journaliste et traducteur
Temesegen GhebreyesuyJournaliste, comédien, acteur
Methanie Haile Journaliste et avocat 
Fessehaye « Joshua » YohannesAuteur, journaliste et dramaturge
Yousif Mohammed AliJournaliste 
Seyoum TsehayeJournaliste 
Dawit Habtemichael Journaliste 
Said Abdelkadir Journaliste 
Sahle « Wedi-ltay » TsefezabJournaliste
Matheos HabteabJournaliste

Situation : Détenus au secret, sans procès depuis septembre 2001
#LibérerLesÉcrivainsÉrythréens #ÉcrivainEnPrison 


Contexte : Il y a vingt ans, en septembre 2001, les autorités érythréennes ont entamé une campagne de répression massive contre les critiques du régime. Les 18 et 19 septembre, dans le cadre de ces mesures, les forces de sécurité ont arrêté et détenu 11 des 15 membres dissidents (communément appelés le G-15) du Front populaire pour la démocratie et la justice (PDFJ) au pouvoir, en les accusant d’avoir commis des crimes contre la sécurité et la souveraineté nationales. Le G-15 avait auparavant publié une lettre ouverte, dénonçant l’abus de pouvoir du président et qualifiant ses actions d’« illégales et anticonstitutionnelles ». 

Le 18 septembre, les autorités ont également suspendu tous les journaux indépendants du pays, notamment les hebdomadaires Meqaleh, Setit, Tsigenay, Zemen, Wintana et Admas, qui ont été fermés pour avoir publié la lettre ouverte du G-15 et mené des entretiens avec les médias sur les questions soulevées dans la lettre. Le 21 septembre, douze journalistes, tous associés aux médias indépendants interdits, ont été arrêtés par les forces de sécurité et placés en détention. Certains de ces journalistes sont également écrivains, poètes, traducteurs, dramaturges, compositeurs de chansons et critiques d’art. Depuis deux décennies, les autorités érythréennes les détiennent au secret, ainsi que les membres du G-15, sans pouvoir communiquer avec les membres de leur famille, leurs avocats ou des médecins indépendants, et sans avoir pu être jugés. 

Au fil des années, des rapports non vérifiés ont fait état de la mort en détention de plusieurs de ces détenus, victimes de mauvais traitements et de négligence. Les autorités érythréennes ont ignoré les appels lancés par les organisations de défense des droits de l’homme et les mécanismes régionaux et internationaux de défense des droits de l’homme demandant que les détenus obtiennent justice, et ont nié officiellement l’existence de la répression en 2002. Les autorités ont également affirmé que les écrivains et les journalistes avaient simplement été dépêchés pour effectuer leur service national, et que toutes les personnes arrêtées en 2001 étaient en vie, sans pour autant apporter de preuves à l’appui de ces affirmations.   

L’Érythrée est un État autoritaire et militaire à parti unique qui figure régulièrement parmi les pires pays du monde en matière de liberté d’expression. Les médias indépendants y sont interdits depuis 2001.  Pratiquement toutes les voix critiques (journalistes, écrivains, poètes, dramaturges, musiciens, artistes, personnalités politiques dissidentes) sont arbitrairement détenues pour des périodes indéfinies, disparaissent, sont forcées de s’exiler ou font l’objet d’exécutions extrajudiciaires. Sa constitution démocratique, qui garantit les libertés d’expression et de la presse, a été ratifiée en 1997, mais n’est pas entrée en vigueur. L’Érythrée n’a pas organisé d’élections nationales depuis son indépendance de l’Éthiopie en 1993. L’Assemblée nationale de transition, qui a été instituée pour faire office d’organe législatif jusqu’à l’organisation d’élections nationales, ne s’est pas réunie depuis 2002. 

Agir

PEN International considère que la détention arbitraire et au secret de journalistes, d’écrivains, de poètes et de critiques du gouvernement érythréens constitue une violation de leurs droits de l’homme, notamment de leur droit à la liberté d’expression, à la liberté individuelle et à la vie. Les autorités érythréennes doivent libérer immédiatement et inconditionnellement Dawit Isaak, Amanuel Asrat, Said Idris « Abu Are », Temesken Ghebreyesus, Methanie Haile, Fessehaye « Joshua » Yohannes, Yousif Mohammed Ali, Seyoum Tsehaye, Dawit Habtemichael, Said Abdelkadir, Sahle « Wedi-ltay » Tsefezab et Matheos Habteab. 

Voici ce que vous pouvez faire :

Réseaux sociaux

  • Faites connaître la situation des journalistes, écrivains, poètes et critiques du gouvernement érythréens détenus sans procès et au secret depuis 20 ans à l’aide des exemples de messages ci-dessous et des hashtags #LibérerLesÉcrivainsÉrythréens #ÉcrivainEnPrison : 

Facebook

  • Depuis vingt ans, les autorités érythréennes détiennent 12 journalistes, écrivains et poètes sans procès et au secret pour avoir exercé légitimement et pacifiquement leur droit à la liberté d’expression. Leur sécurité et leur état de santé demeurent inconnus. Aujourd’hui, je me joins à PEN International pour demander leur libération immédiate et inconditionnelle. Aidez-nous à #LibérerLesÉcrivainsÉrythréens en partageant ce message #ÉcrivainEnPrison [insérer le lien]
  • À l’occasion de la Journée de l’#ÉcrivainEnPrison commémorée par PEN cette semaine, j’agis pour #LibérerLesÉcrivainsÉrythréens. Écrivez une lettre ou un e-mail aux autorités érythréennes pour leur demander de libérer immédiatement et inconditionnellement les écrivains. Soutenez la liberté d’expression [insérer le lien]

Twitter

  • Aujourd’hui, je me joins à @pen_int pour demander aux autorités érythréennes de #LibérerLesÉcrivainsÉrythréens emprisonnés depuis septembre 2001 pour avoir exprimé pacifiquement des opinions dissidentes. Soutenez leur cas en partageant ce message RT #ÉcrivainEnPrison [insérer le lien]
  • À l’occasion de la Journée de l’#ÉcrivainEnPrison commémorée cette semaine par @pen_int, j’agis pour #LibérerLesÉcrivainsÉrythréens. Écrivez un appel aux autorités érythréennes pour leur demander de libérer immédiatement et inconditionnellement les écrivains. Soutenez la liberté d’expression [insérer le lien]

Veuillez lire et partager « Le fléau de la guerre », un poème de l’écrivain emprisonné Amanuel Asrat

Quelque chose a grogné

Quelque chose a grondé

Envahissant le calme

Ça a résonné.

… Coincé

Là où deux frères se croisent

Là où deux frères se rencontrent

Là où deux frères se rejoignent

Sur la place de la vie et de la mort

Dans le gouffre entre culture et calamité

Dans la vallée entre anxiété et paix

Quelque chose a grondé.

Pendant que les acacias chia et seraw se crachent dessus

Le sorgho et le millet s’entretuent

Sans personne pour les récolter, ils se nourrissent les uns des autres,

Jusqu’à ce qu’il ne reste qu’une seule graine…

Débordant de larmes

Découpés en morceaux

Semés en eux-mêmes.

… plantés

Dans la terre qui doit encore jaillir
Dans cette chose indiscernable

Ruisseau de sang et d’eau,

La graine…

Assaillie par :

Le soleil glacial

Les nimbus orageux

Des éclairs grisâtres

La pluie brûlante…

Glissant sur le fer usé

Escaladant l’esprit de la mort

Endossant sa vie stérile

Ici, elle s’est accrochée à la source.

La graine…

Arrivée seule

Du sang et de l’eau qui doivent encore jaillir

Dont on ne sait à qui elle appartient

Ses affluents non identifiables

Quand elle a quitté cette source

Mais dans cette source…

Quand la graine regardait à droite

C’était un homme, c’était une barbe

Quand elle regardait à gauche

C’était la terre, c’était une graine

Abasourdie… elle se nourrissait d’étonnement

Tentée… mais pas question d’unir nos forces

Avec qui doit-elle rester, où doit-elle se cacher ?

Qui doit-elle vaincre ou sur qui doit-elle être jetée ?

Mais la saleté de cette source est sa laideur

Labourant avec le bec d’une balle

Renversant des vies infinies
Balayant le souffle

Fauchant la mort avec la mort

La battant sur les épaules de nos enfants

Finissant par meurtrir le fruit par méfiance.

Car le fruit…

Lorsque le jour et la nuit ne font plus qu’un

Mélange d’anxiété et de calme

Un monde dans un monde

La guerre dans la paix

La confiance dans la porte dérobée de la trahison

Sombrant dans le désarroi.

N’est-ce pas déconcertant ?

Le fléau de cette source de la guerre

Après les larmes d’une mère pour ses enfants

Les larmes du clan pour son temps

Les larmes de la terre pour la terre

Se sont écoulées tel un ruisseau

Bientôt la terre devint humide et boueuse

La propriété, embourbée

Piégeant tout le monde… les volant
Alors la pelle et le pic furent créés

Et le linceul et le brancard apparurent

Mais…

Tout s’épuise si vite que chacun se rue dessus

Chacun d’entre nous le convoite et le possède

La laideur de cette chose, la guerre

Quand sa source arrive sans qu’on la désire

Quand ses échos ravageurs frappent à votre porte

C’est alors que la malédiction de la guerre provoque le malheur

Mais… Vous la servez bon gré mal gré

Vous lui tenez compagnie contre votre gré

Et pourtant, vous priez si fort pour qu’elle se taise !

Amanuel Asrat (1999). Traduit du tigrinya par Tedros Abraham en collaboration avec David Shook (2015)

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